L
e Musée du Patrimoine Immatériel a ouvert ses portes à Marrakech le 23 février, dans l’ancien siège de Bank Al Maghrib, marquant une étape importante dans la compréhension du concept même de patrimoine immatériel.
La Tribune est allée à la rencontre de Mehdi Qotbi, président de la Fondation Nationale des Musées, pour nous éclairer sur les enjeux de cette notion complexe. La disparition d’expressions culturelles telles que les traditions orales, les rituels, les pratiques sociales ou encore les savoir-faire, est au cœur des préoccupations internationales. Il s’agit d’un patrimoine mouvant, perçu comme un élément constitutif de l’identité culturelle d’une société. Sa préservation devient une nécessité pour maintenir une identité et transmettre les traditions aux générations futures. Toutefois, l’évolution est aussi une qualité intrinsèque à ces objets culturels, pour assurer leur pérennité. Ils sont appelés à se renouveler au contact de la communauté vivante, en perpétuelle réinvention. Comment un musée peut-il veiller à préserver ce dynamisme ? Plus qu’un simple lieu d’exposition, le Musée du Patrimoine Immatériel de Jamaa el-Fna est le fruit d’une réflexion approfondie sur la richesse et la diversité des expressions culturelles immatérielles, qui constituent un héritage d’une valeur inestimable. Sa création résulte de la dynamique politique impulsée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, qui a souhaité ériger la culture en priorité nationale, la plaçant au cœur de la stratégie de développement du pays.
Ainsi que le précise M. Qotbi, la Fondation Nationale des Musées, en collaboration avec ses partenaires, a souhaité créer un musée qui puisse “jouer le rôle de gardien de la mémoire et représenter un temple d’art et de culture au service de cette place mythique”. La place Jamaa el-Fna, inscrite comme patrimoine culturel immatériel de l’Humanité par l’UNESCO depuis 2008, est au cœur de l’exposition inaugurale du musée. Les visiteurs peuvent y découvrir l’histoire de Marrakech et de son iconique médina, la présentation de la halqa, les hlaiqis (conteurs) et leurs savoir-faire. Le musée présente également une section numismatique en hommage à Bank Al Maghrib, ainsi que des œuvres d’artistes majeurs comme Jacques Majorelle.
Mais cet espace n’est pas qu’un simple musée, il a été pensé comme “un lieu de vie, de rencontre et de dialogue à l’image de la place elle-même”, nous confie M.Qotbi. Les missions des équipes du musée sont de documenter, sauvegarder et faire valoir les traditions et les pratiques de la région. Les communautés concernées et les détenteurs de ces savoir-faire sont ainsi appelés à participer activement au projet, de la constitution et l’enrichissement des collections à l’exposition de celles-ci. M. Qotbi souligne que “cet espace culturel vient enrichir l’offre muséale et touristique de Marrakech, aspirant à devenir une fenêtre ouverte sur la ville et à attirer des visiteurs d’ici et d’ailleurs”. Dans cette optique, la Fondation Nationale des Musées entend perpétuer ce travail en ouvrant des musées similaires dans différentes régions du Royaume, permettant ainsi aux habitants de (re)découvrir et de se réapproprier leur patrimoine millénaire.
M.A.