FARID TRIKI une mémoire vivante de l’art

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Farid Triki est un personnage. Un vrai de vrai. De ceux qui ont toujours refusé de se laisser piéger dans des cadres trop étroits et que l’on pourrait écouter pendant des heures, pendus à son phrasé, ses apartés et ses histoires, éclairantes et toujours pertinentes, qu’il raconte avec la ferveur d’un doux rêveur.

 

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lutôt discret avec l’âge, il arrive qu’on puisse encore croiser ce charmant monsieur au Café de la Poste, et c’est alors une chance de s’attabler avec lui, surtout si vous aimez l’art marocain. Car Farid Triki, né en 1946, en connaît un rayon sur la question. Ancien élève de l’Ecole normale supérieure de Rabat, ce Marrakchi passionné par le dessin et les questions identitaires fut de cette génération d’artistes qui suivit, dans les années 70, la voie audacieusement ouverte par Ahmed Cherkaoui vers une forme d’art plastique profondément nationale.

 

A travers les signes, les formes, les supports et les matériaux locaux, Farid Triki a joué son rôle quant à son évolution. D’abord le pinceau à la main, à la faveur d’une peinture profondément humaine, rurale et en mouvement, qu’il exposera à de rares occasions, principalement dans les années 1980 et au début des années 2000. Mais aussi, et surtout, en diffusant ses connaissances en histoire de l’art, un domaine sur lequel il se montre insatiable, encore aujourd’hui, et qu’il a enseigné longtemps au Centre national pédagogique de Marrakech.

 

“A l’époque, il fallait repenser les programmes, renouveler l’expression artistique en la ramenant à nos racines, sans pour autant mettre au placard tout ce que nous ont apporté l’académisme et la sensibilité artistique occidentale. A mon niveau, dit-il humblement, je crois y avoir participé, en accompagnant mes étudiants à réfléchir sur ces nouvelles préoccupations artistiques intérieures”.

Ce qui ne l’empêche pas de continuer à publier dans des revues d’art, qu’il n’a d’ailleurs que très peu quittée durant sa vie, si ce n’est pour poursuivre ses études. Et quand bien même il dit ne plus trop la reconnaître, Farid Triki contemple toujours la cité ocre avec l’affection des grands sages.

 

« Plus que les plans urbanistiques, les raisonnements matérialistes ou le développement économique, ce sont les gens qui m’intéressent », aime souligner cet homme chez qui le regard s’illumine dès lors que l’on évoque le sort de ses anciens étudiants. Certains ont réussi, d’ailleurs. On pense à Noureddine Daifallah, Hocine Aït Amghar, Larbi Cherkaoui ou encore Nouredine Chater. Toujours passionné, il continue à questionner la peinture, et poursuit ses recherches picturales qui ne cache ni ses pensées, ni la tendre sensibilité qui le caractérise et que ses oeuvres plastiques ne cessent de dévoiler.

J.B.