Jean Nouvel est le monstre sacré de l’architecture française qui a su marquer de son empreinte des réalisations singulières situées aux quatre coins du globe. C’est à ce visionnaire passionné et militant, que l’on doit, entre autres, l’Institut du Monde Arabe, la Fondation Cartier pour l’art contemporain, le Musée du Quai Branly – Jacques Chirac à Paris, la Tour Agbar à Barcelone, le One Central Park à Sydney ou encore le Louvre d’Abu Dhabi. La Tribune de Marrakech s’est entretenue avec Jean Nouvel, l’un des architectes contemporains les plus courtisés au monde.

 

 

 

Jeune, Jean Nouvel se rêvait artiste-plasticien avant de prendre place sur les bancs de l’École des Beaux-Arts de Bordeaux, puis de l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris dont il sort diplômé en 1972. “Je suis devenu architecte, en partie grâce à mon professeur de dessin en seconde qui m’a éveillé aux arts plastiques. Je suis né dans une famille d’enseignants, je ne voulais absolument pas être prédestiné à la même carrière. J’ai ainsi décidé d’intégrer l’école des Beaux-Arts ; une décision peu appréciée par mes parents à l’époque”, explique Jean Nouvel. Le natif de Fumel se passionne ainsi pour l’architecture qu’il considère comme une forme d’art. Il ouvre alors sa première agence en 1970 et quelques années plus tard, il co-fonde le mouvement «Mars 1976» qui lutte contre le corporatisme, puis il participe à la création du Syndicat de l’Architecture.

 

Un architecte contextuel

Connu et reconnu pour son militantisme architectural, Jean Nouvel se revendique aussi architecte de situation : “L’architecture naît des situations, elle a toujours une histoire ; celle d’une rencontre avec une personne ou un lieu. Pour moi, chaque projet a des raisons profondes et il est incomparable avec un autre”, nous affirme Jean Nouvel. Une philosophie qui se défie de la notion de style et qui fait la singularité de ses réalisations : “Ce qui m’a marqué pendant mes études, c’est la domination du style international. C’était l’époque de la typification, le début du clonage, des suites d’immeubles qui n’ont aucun lien les uns avec les autres. Cette période a déterminé ma position par rapport à l’architecture. Je suis un contextuel, mon maîtremot c’est l’appartenance, car un projet appartient à une culture, à un lieu, à une personne… Quelque chose qui est destitué n’a pas de valeur. C’est une question de pertinence, le sens se manifeste par rapport à ce qu’il y a autour et à l’époque, l’architecture est un marqueur d’époque.”

 

Ouvrez l’oeil, et le bon !

Mais où Jean Nouvel puise-t-il son inspiration ? Sa réponse ne se fait pas attendre : “Tout m’inspire ! Je suis un voyeur, comme les architectes et les cleptomanes. On essaie de regarder partout, on est partagé par tout ce qui nous entoure. Quelquefois on fait face à une sensation que l’on aimerait retransmettre, amplifier, c’est à partir de cette attitude que les projets naissent. C’est une question de correspondance aussi, il y a des choses qui se prêtent à des extrapolations, d’autres pas. On est toujours surpris par ce qui touche à notre mémoire, ce qui nous marque. C’est ce qui fait la force de l’art”.

 

Engagé et engageant, Jean Nouvel ne cesse de surprendre et de nous faire rêver. Au cours des quelques moments partagés avec l’architecte, nous avons pu apercevoir l’homme, l’artiste, et surtout l’expression même d’un art que l’on oublie trop souvent de citer. Et pourtant le travail de Jean Nouvel fait parler de lui, comme par exemple sa Marseillaise (Marseille, France), élue il y a peu comme le second plus beau gratte-ciel du Monde par l’entreprise allemande Emporis, ou encore son projet grandiloquent du Musée d’art de Pudang (Shanghaï, Chine) ; bien des projets que nous ne manquerons pas de garder en mémoire, et qui nous auront donné l’envie de prêter plus d’attention à ce qui nous entoure, et à ce qui fait le caractère de notre environnement architectural.