Café de spécialité : Pourquoi vous ne boirez plus jamais votre café comme avant


    On pense le connaître par cœur. Il est notre carburant du matin, notre réflexe après le déjeuner. Pourtant, la plupart d’entre nous buvons du café sans vraiment le goûter. Et si on vous disait que l’amertume n’est pas normale ?

    Nous avons rencontré Ali El Idrissi Dafali, l’un des trois seuls experts certifiés Q-Grader au Maroc (l’équivalent d’un œnologue pour le café). Il déconstruit pour nous les mythes de notre « kawa » quotidien.

    1. Le mythe de l’amertume

    C’est la première chose qu’Ali nous apprend : « Le café n’est pas amer, il n’a pas un goût de brûlé. » Si votre café vous fait grimacer sans sucre, c’est souvent parce que le grain est de mauvaise qualité ou qu’il a été brûlé à la torréfaction pour masquer ses défauts. « Le café est un fruit. Il est naturellement sucré ». Un bon grain, bien sourcé et bien torréfié, révèle des notes qui vont du chocolat à l’amande, en passant par la pêche, le citron ou même l’encens. Pas besoin de sucre.

    2. Arabica, Robusta : deux mondes opposés

    Vous avez sûrement déjà vu ces mots sur un paquet, sans vraiment comprendre. En résumé : l’Arabica est le raisin de cuve, le Robusta est le raisin de table.

    L’Arabica pousse en altitude, mûrit lentement, développe des arômes fins — mais contient peu de caféine. Le Robusta pousse plus facilement, résiste mieux aux maladies, mais concentre deux à trois fois plus de caféine. Résultat : plus d’amertume, moins de subtilité. « C’est comme comparer un caniche à un berger allemand, illustre Ali. Tous deux des chiens, mais pas les mêmes caractéristiques. »

    Le café industriel ? Souvent du Robusta, ou un mélange des deux, torréfié à outrance. Le café de spécialité ? Toujours de l’Arabica, noté au-dessus de 80/100.

    3. La note de 80/100 : La frontière du goût
    Tout comme le vin a ses Grands Crus, le café a son élite : le « Specialty Coffee ». Pour mériter ce titre, un café doit obtenir une note supérieure à 80 sur 100, attribuée par des juges certifiés (les fameux Q-Graders) selon des critères précis : acidité, équilibre, longueur en bouche, propreté de la tasse.

    En dessous de 80 ? C’est le café « commodité », celui des grandes surfaces et des distributeurs automatiques. Au-dessus ? C’est une expérience — avec une traçabilité complète, de la ferme jusqu’à votre tasse.

    4. La règle des 3 secondes

    Pourquoi est-il si difficile de boire un excellent café ? Parce que la chaîne est fragile. Ali prévient : « Le café est une épice de luxe qui a accompagné l’humanité, mais c’est un produit très fragile. » Il suffit d’un rien pour tout gâcher. Si le fermier travaille mal, le torréfacteur ne pourra rien sauver. Si le torréfacteur rate sa cuisson, le grain est perdu. Et au final, devant la machine : « Un décalage de 3 secondes sur l’extraction suffit pour rendre le café imbuvable. »

    Pourquoi s’y mettre maintenant ? Boire un café de spécialité, c’est arrêter d’avaler un liquide noir par habitude. C’est ralentir pour passer d’une consommation « réflexe » à une dégustation « consciente ». C’est redécouvrir un produit noble, sain et aromatique. Et contrairement aux idées reçues, ce n’est pas réservé aux initiés : « On veut que le specialty coffee devienne une norme, pas un luxe », affirme Ali.

    Demain, dans notre Calendrier de l’Avent, nous vous emmenons à Sidi Ghanem, dans le laboratoire où Ali met cette science en pratique.